La qualité des soins doit pouvoir être mesurée. Son amélioration nécessite des données chiffrées pour analyser l’existant, définir les actions à mettre en œuvre et objectiver les progrès. Parmi les indicateurs de résultats, les indicateurs de qualité rapportés par les patients sont un des axes portés par la stratégie de transformation du système de santé (« Ma santé 2022 »). Celle-ci promeut une médecine plus centrée sur le patient, plus soucieuse de la valeur ajoutée pour le patient et de sa pertinence clinique. Par conséquent, la mesure des résultats de soins rapportés par le patient ou « Patient-Reported Outcome Measures » (PROMs) s’impose peu à peu, au point de devenir un élément incontournable, dans le design des essais cliniques notamment.
« Cette approche figure dans les priorités identifiées par la Haute autorité de santé (HAS) dans son projet stratégique 2019-2024, explique le Dr Grillet. L’instance souhaite ainsi accélérer ce mouvement. Jusqu’à présent, les médecins se souciaient bien sûr déjà du résultat de leur prise en charge. Mais on s’est aperçu que lorsque le patient évaluait lui-même ses soins au moyen d’auto-questionnaires dans l’intervalle entre les consultations, les appréciations différaient entre soignants/soignés. Ceci pour de multiples raisons liées à la relation patient/médecin notamment, aux oublis, aux difficultés de formuler un avis global sur une période de plusieurs mois, à l’absence de prise en compte des remarques de l’entourage (utile dans le traitement par PPC), etc. »
Les indicateurs mesurés auprès des patients peuvent se présenter sous la forme d’une mesure des résultats de soins rapportés par le patient (PROMs)*. Ils permettent ainsi de détecter des changements de l’état de santé du patient. Les questionnaires utilisés peuvent être génériques, utilisables quelle que soit la pathologie, ou spécifiques à une pathologie.
Il peut s’agir aussi de mesurer l’expérience du patient concernant son parcours de soins, ou « Patient-Reported Experience Measures » (PREMs). Cet indicateur s’intéresse à la manière dont le patient vit l’expérience des soins sur différentes dimensions : le temps d’attente, l’accès aux soins, l’implication dans la décision, la qualité de la communication… Comme pour les PROMs, il existe des PREMs génériques et des PREMs spécifiques.
Enfin, la satisfaction du patient quant au service rendu peut également être mesurée.
Ces trois types de mesures sont complémentaires.
La mise en œuvre en pratique clinique courante des mesures de la qualité perçue par les patients permet d’améliorer significativement leur prise en charge. A cette fin, les PROMs constituent de bons outils de participation des usagers à l’amélioration personnelle ou collective de leurs parcours de soins.
Côté patients, les PROMs contribuent à une meilleure compréhension de la maladie et des symptômes, à identifier les plus importants et à mieux les communiquer. Vocabulaire commun entre patients et professionnels, les PROMs facilitent donc la communication.
Côté professionnels de santé, les PROMs les aident à discuter avec les patients de leurs difficultés dans le soin et de la satisfaction ou non de leurs besoins. Le suivi serait donc potentiellement plus efficace, les prises en charge plus adaptées, d’où des impacts cliniques très concrets et parfois importants, comme une amélioration de l’espérance de vie et de la qualité de vie.
« Il n’est plus possible aujourd’hui de concevoir la recherche clinique et le suivi des patients sans tenir compte des « Patient-Reported outcome measures » (PROMs), souligne le Dr Yves Grillet. Ces PROMs seront un des éléments clés pour les tarifications futures fondées sur la qualité des soins. Et les hôpitaux ne sont pas les seuls concernés, bien au contraire ! Les médecins libéraux ne doivent pas être en reste car il est fort probable que les procédures liées à cette nouvelle conception du soin soient, à terme, opposables. En effet, la participation active du patient à sa prise en charge influera sur la tarification des actes, dans le cadre de la « Value-Based Healthcare » : il ne s’agira plus à l’avenir de tarifer les « process » (les actes) mis en œuvre, mais bien les résultats obtenus en termes de qualité mesurée, et les parcours. Précisément, dans le SAHOS, les études font ressortir une importante valeur ajoutée de l’accompagnement du médecin et du traitement. L’appropriation par les médecins libéraux des PROMs est une manière de démontrer et de revendiquer leur valeur ajoutée. »
Dans le cadre d’un appel à projets de la HAS, celui porté par la Fédération française de pneumologie (FFP) – le Conseil national professionnel de pneumologie – a été retenu avec trois autres parmi 43 dossiers, toutes spécialités confondues. Consciente de l’intérêt des PROMs, la FFP a souhaité évaluer la possibilité et les conditions d’une accélération du déploiement des PROMs dans le SAHOS des patients de plus de 15 ans sous traitement par pression positive continue.
Ce projet est fondé sur un carnet patient numérique qui permet de recueillir les PROMs. Il s’agit du carnet digital Adel Patient, mis à la disposition de la FFP par la société DataMedCare. « Il s’agit d’une étude en vie réelle de type « Preuve de concept », dont l’objectif est d’évaluer concrètement les facteurs conditionnant une accélération du déploiement de PROMs à large échelle dans le suivi des traitements par pression positive continue (PPC), en identifiant les freins que rencontrent les médecins à leur utilisation et les leviers qui pourraient être implémentés pour favoriser ce déploiement, résume Yves Grillet. Nous avions déjà une expérience et des outils avec le carnet SomRespir conçu avec la Fédération française des associations et amicales des malades, insuffisants ou handicapés respiratoires (FFAAIR – 2000 patients). Cette évaluation sera décisive pour le suivi individuel des patients, mais également en termes de dépenses de santé, avec un retour sur les organisations de soin et l’efficacité des traitements. Il est crucial que les pneumologues ne soient pas en retard sur ces questions, et même proactifs. »
Une partie du carnet ADEL Patient regroupe :
Le carnet demeure la propriété du patient, qui décide ou non de le partager avec son médecin. En plus de remplir les questionnaires PROMs, le patient peut ainsi visualiser les données télétransmises par l’appareil de PPC.
Les médecins volontaires peuvent s’inscrire jusqu’au mois de juin 2022. Le recrutement des patients s’effectuera lui aussi jusqu’en juin 2022, date à laquelle sera effectuée une première évaluation au moyen d’un questionnaire destiné aux médecins participants. Le recueil des données se terminera en juin 2023, où une seconde évaluation parmi les médecins sera effectuée.
Un rapport final sera transmis à la HAS fin 2023.
Pour participer à cette expérience ou pour tout complément d’informations : contactproms-adelpatients@ffpneumologie.org
Depuis le lancement du projet Prom’s, entre octobre 2021 et début mars 2022, 500 carnets ont déjà été créés.
La création du carnet ADEL Patient est simple et gratuite, à partir de l’accès ADEL Médecin. La création d’un carnet est très rapide. Le médecin peut ensuite gagner du temps dans sa prise en charge, en consultant d’un coup d’œil l’historique des données patient, les effets secondaires, etc.
Accès à la plateforme ADEL Santé
Tutoriel pour la création d’un carnet à l’attention des médecins
Tutoriel pour le patient sur ses fonctionnalités
Hélène Joubert
Références :
* HAS Qualité des soins perçue par le patient – Indicateurs PROMs et PREMs, juillet 2021
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